LES VIEUX
ANNE HÉBERT
POÈMES NOUVEAUX 1987-1989
Parmi les troncs griffus des citronniers
Sous les feuillages chantants
Piqués de fruits d’or
Ils promènent leurs os cassants
D’un air faussement distrait.
Insectes et fleurs interchangeables
Ils se reconnaissent de loin
Se flairent à distance
Captent un pollen dans l’air
Un amour en perdition qui s’évapore.
Ils se saluent profondément
Se font des tas de petites manières polies
Parlent du beau temps et de la pluie
Insomnies douleurs et courants d’air
Sont évoqués avec déférence
Intarissables comme si le temps leur appartenait encore
Il semblent ignorer qu’ils sont morts
Depuis pas mal d’années.